Le 27 avril 2023, la Cour suprême de Lettonie et l’ACA-Europe ont organisé le séminaire « Le juge et l’administration inerte. Le pouvoir discrétionnaire administratif » à Riga, en Lettonie. Ce fut l’ultime séminaire de la présidence italienne. Il a réuni plus de cinquante participants, représentant les conseils d’État et les cours administratives suprêmes des 28 États membres de l’ACA-Europe, ainsi que la Cour de justice de l’Union européenne. |
Le séminaire a débuté par de chaleureux discours de bienvenue, qui ont donné le ton de la journée et souligné l’importance du sujet abordé. En ouverture du séminaire, le président de Lettonie, M. Egils Levits, a rendu hommage aux participants dans un discours soulignant le rôle de la justice administrative comme protectrice des valeurs du système démocratique des États. Il a également souligné l’incidence des événements historiques sur le développement des procédures administratives en Europe, et encouragé les participants à réfléchir aux défis actuels liés à l’application des normes juridiques. D’éminentes personnalités, telles que le président de la Cour suprême de Lettonie, M. Aigars Strupišs, et le vice-président du Conseil d’État italien, M. Carmine Volpe, ont honoré de leur présence la séance d’ouverture du séminaire. Elles ont prononcé des discours exposant leurs précieuses perspectives sur l’importance du sujet du séminaire. Le séminaire a pris la forme de trois tables rondes. Pour entamer un débat en profondeur, chaque table ronde a consisté en une présentation par des représentants de trois États membres, exposant leur approche nationale et leur expérience sur la question abordée. La première table ronde, animée par le Dr Edvīns Danovskis, professeur associé à l’Université de Lettonie, a été consacrée au pouvoir discrétionnaire administratif. Le rapporteur, le Dr hab. Jacek Chlebny, président de la Cour administrative suprême de Pologne, a exposé la notion de discrétion administrative dans la jurisprudence polonaise. Le Dr Anna Sporrer, vice-présidente de la Cour administrative suprême d’Autriche, a centré sa présentation sur l’analyse du pouvoir discrétionnaire des autorités administratives et l’examen de l’utilisation du pouvoir discrétionnaire par les tribunaux administratifs en Autriche. Enfin, Mme Anita Kovaļevska, juge au sein du Département des affaires administratives de la Cour suprême de Lettonie, a exposé la perspective lettone du contrôle judiciaire de l’utilisation des pouvoirs discrétionnaires administratifs. Le débat a porté sur les points de vue nationaux en matière de pouvoir discrétionnaire, la distinction entre pouvoir discrétionnaire et marge d’appréciation dans l’interprétation de notions juridiques non définies, ainsi que les limites du contrôle judiciaire. La discussion a révélé une compréhension similaire de l’essence du pouvoir discrétionnaire au sein des États membres. Des différences ont toutefois émergé sur le contenu du pouvoir discrétionnaire (s’il convient de faire une distinction entre le pouvoir discrétionnaire au sens strict et la marge d’appréciation dans l’interprétation de notions juridiques non définies) et, par conséquent, sur l’étendue du contrôle judiciaire sur l’utilisation du pouvoir discrétionnaire par les autorités. Le président de Lettonie a aussi participé à la première table ronde, au cours de laquelle il a exprimé son point de vue sur la compétence et les tâches des tribunaux administratifs dans l’examen des décisions des autorités. Son opinion a suscité un vif intérêt de la part du public. Les deuxième et troisième tables rondes du séminaire ont été consacrées aux problèmes de l’administration inerte, ainsi qu’au rôle et à la compétence des tribunaux à cet égard. La seconde table ronde a été habilement animée par Mme Laila Medina, avocate générale à la Cour de justice de l’Union européenne. Le rapporteur, M. Luigi Carbone, président de section du Conseil d’État d’Italie, a présenté la notion de silence administratif en Italie. Il a souligné le fait qu’il est non seulement important de protéger les droits et les intérêts des personnes affectées par le silence administratif, mais aussi de mettre en place des mécanismes visant à prévenir un tel silence administratif. Le Dr Barbara Pořízková, vice-présidente de la Cour administrative suprême de la République tchèque, a centré sa présentation sur le sujet de l’élargissement de la portée de la protection judiciaire contre l’administration inerte. Elle a souligné le fait que les tribunaux tchèques ont longtemps tenté de trouver un équilibre entre, d’une part, la protection efficace des droits et des intérêts individuels de l’État et, d’autre part, la lettre de la loi. L’équilibre est passé d’une insistance positiviste sur la lettre de la loi à une protection plus poussée (mais pas illimitée) des droits. Pour finir, M. Yves Gounin, conseiller d’État au Conseil d’État de France, a fait part de l’expérience française de contrôle du silence administratif et de l’incidence du passage d’un modèle négatif (silence vaut refus) à un modèle positif de silence administratif (silence vaut acceptation), en tant que principe général. La troisième et dernière table ronde a été habilement animée par Mme Ieva Višųere, juge au sein du Département des affaires administratives de la Cour suprême de Lettonie. Le rapporteur, le Dr Suzana Maria Calvo Loureiro Tavares da Silva, juge à la Cour administrative suprême du Portugal, a exposé les recours juridiques portugais contre l’administration inerte. Mme Iskra Aleksandrova, juge à la Cour administrative suprême de Bulgarie, a décrit la manière dont les modèles négatif et positif de silence administratif étaient régulés dans la législation bulgare, ainsi que la pratique judiciaire en cas de silence administratif. Enfin, M. Éric Thibaut, auditeur général adjoint au Conseil d’État de Belgique, s’est concentré sur les limites croisées du contrôle juridictionnel de l’utilisation du pouvoir discrétionnaire d’appréciation de l’autorité administrative en droit belge. Le fait que le silence administratif puisse avoir des conséquences juridiques diverses a été souligné lors des deuxième et troisième tables rondes. Le silence des autorités, en particulier, peut être considéré comme un rejet tacite de la demande. Inversement, une demande non rejetée en temps utile peut être censée avoir été accordée. Simultanément, le silence administratif peut ne pas avoir d’effets spécifiques, et ne pas signifier que l’administration fasse droit ou refuse la demande, malgré le fait qu’une personne puisse, par exemple, prendre des mesures contre l’inaction de l’autorité. Il ressort de la discussion qu’il existe de nombreux aspects communs dans les conceptions nationales du silence administratif. Ce sont toutefois les différences (la protection des droits de la personne en cas de silence administratif, ainsi que le droit dont dispose l’autorité de prendre une décision divergeant de la décision tacite antérieure) qui ont fait l’objet des débats les plus poussés. Le séminaire s’est terminé en beauté, par un discours récapitulatif exhaustif du Dr Jānis Pleps, juge au sein du Département des affaires administratives de la Cour suprême de Lettonie, qui a résumé les principaux points à retenir de chaque table ronde. Cette synthèse a non seulement servi de vigoureux rappel du contenu enrichissant du séminaire, mais également encouragé les participants à approfondir leur examen des questions soulevées à cette occasion. |